Il y a de ca 2 semaines, je répondais aux questions (sur la préparation physique dans le basket) de Xavier Barbier, préparateur physique spécialisé dans le Football Américain… On vient de changer les rôles, c’est maintenant Xavier qui répond à mes questions, voici l’interview:

Salut Xavier, peux-tu te présenter pour les personnes qui ne te connaissent pas?

Salut Thomas, merci de m’accueillir sur le blog de la Training Academy !

Je m’appelle Xavier Barbier, j’ai 32 ans. Je suis préparateur physique et fondateur de Performance Athlétique, une structure de services de préparation physique dédiés aux sportifs de compétition.

Tu es spécialisé en football américain. Comment ton parcours t’a emmené à la préparation physique et à ce sport en particulier?

Tout d’abord je suis un ancien joueur. J’entame ma 18ème année dans le football américain en France et je suis entraineur depuis 12 ans. Lors de mes études universitaires en STAPS je me suis orienté vers l’entrainement et la préparation physique. J’ai toujours eu le football américain à l’esprit lorsque j’étais étudiant. Mes rapports, dossiers et mémoires tournaient toujours autour de l’activité lorsque j’en avais la liberté. C’était d’ailleurs un peu compliqué lorsque les enseignants étaient ignorants des rudiments de ce magnifique sport.

A la fin de mes études, j’ai eu l’opportunité de travailler pour la Fédération Française de Football Américain. Durant mes 4 années pour la FFFA, j’ai eu diverses missions dont celle de travailler sur une structure du parcours d’excellence sportive dont j’étais un ancien stagiaire, le Pôle Espoir d’Amiens, et de m’y occuper, entre autres, de la préparation physique des internationaux juniors et séniors membres de celle-ci. Parallèlement à cela j’intervenais sur le club local des Spartiates évoluant en Elite.

Depuis 2009, je me suis relocalisé sur l’Ile-de-France et j’interviens auprès des Corsaires d’Evry. Je travaille également avec la Ligue Francilienne de Football Américain sur différents événements de détection ou perfectionnement.

Ainsi, même si j’ai travaillé avec des sportifs de haut-niveau dans d’autres sports, le football américain me colle à la peau. Ce qui n’est pas pour me déplaire. J’en parle d’ailleurs beaucoup sur mon blog, http://xavierbarbier.com/blog/

Comment fais-tu pour continuer à progresser dans ta pratique?

Je lis énormément. Livres, blogs, publications. Les productions françaises étant limitées, je me tourne vers l’Amérique du nord. Je trouve qu’en France on reste très général et pas assez pratique. Ou alors des formats des formation continue qui ne sont pas adaptés à notre métier. En Amérique du nord, il y a beaucoup de blogs, de ebooks ou de DVD avec du contenu très précis et pointu sur de nombreux domaines de la préparation physique. L’organisation fréquente de colloques d’un ou deux jours permet d’échanger avec d’autres professionnels et d’obtenir des solutions très pratiques à des problèmes très précis que l’on rencontre tous.

Enfin, j’essaie de rencontrer et/ou d’échanger autant que possible avec d’autres préparateurs physiques français ou québécois. Chacune de ses rencontres dure généralement plusieurs heures et est très enrichissante, tant sur le plan professionnel que personnel.

Tout ceci fait que je pense être bien meilleur maintenant que je ne l’était il y a 4 ans, mais moins bon que ce que je serai dans 4 ans !

As-tu déjà eu l’occasion de te rendre aux U.S., au Canada (ou ailleurs) pour observer et/ou t’occuper d’athlètes?

L’unique occasion qui m’a été donnée de me rendre en Amérique du nord a été au Canada pour une compétition avec la FFFA. Je n’ai donc pas eu beaucoup de temps pour la visite. J’ai surtout pu observer que la France était loin, très loin derrière le Canada en termes d’installations sportives. J’étais sur le campus d’un CEGEP de 2ème division et les installations étaient bien mieux que la majorité des CREPS que j’ai eu l’occasion de visiter en France.

Le football américain étant peu représenté en France, comment considères-tu le niveau de sa préparation physique ici?

Le football américain grandit rapidement en France, surtout en Ile-de-France et chez les jeunes. Concernant la préparation physique, je dirais que le football américain en France a toujours eu la culture du « travail » physique. Nous avons l’exemple américain où 50% du temps annuel d’entrainement est dédié à la préparation physique. Mais nous n’avons pas encore une culture moderne de la « préparation » physique.

De ce fait, beaucoup de clubs ont encore une approche datant du siècle dernier, au sens propre comme figuré. C’est-à-dire qu’ils assemblent des méthodes venues du bodybuilding (pour la musculation), du sprint (pour la vitesse) et de la course à pied (pour le travail énergétique) sans avoir une vue d’ensemble. Avoir une vue d’ensemble, un système, signifie que toutes séances ou exercices est orienté vers les besoins athlétiques du football américain.

Les erreurs sont nombreuses. Tout d’abord, je ne comprends pas que l’on puisse encore se préparer physiquement uniquement en début de saison. Les qualités physiques se détériorent au bout de 15 à 30 jours. Il faut donc un travail à l’année.

Ensuite, je vois encore certaines équipes faire leur travail énergétique ou leurs évaluations avec les « fameux » gassers ou 300’s alors qu’ils ne tiennent pas la route une seule seconde d’un point de vue physiologique. Sans oublier les séances de long jogging, parfaites pour faire apparaitre des pathologies aux chevilles, aux genoux et au dos chez les hommes de ligne.

En musculation, l’erreur classique est d’oublier que l’important est de développer une force transférable sur le terrain. Pas d’être le plus volumineux possible ou d’être celui qui a les plus gros pecs.

Quant au travail de vitesse, il copie trop souvent celui du sprinter. Alors qu’au football américain nous avons 2 problèmes : nous devons changer de direction et nous avons des phases de combat. La vitesse au football américain est bien plus que du sprint. Il faut savoir accélérer, décélérer et changer de direction à la fois en ligne droite et en latéral. Tout ceci s’apprend.

Enfin, tout le monde s’accorde sur le fait que le football américain est un sport traumatisant pour son pratiquant. Cependant, il est très rare que l’on intègre des stratégies visant à réduire les risques de blessures et conserver l’intégrité physique des joueurs.

La liste des erreurs de préparation physique limitant la performance sur le terrain est vraiment longue. Il y a tellement de fausse vérités et idées reçues répandues ! Sans compter ce que les gens trouvent sur le net. Ils voient un exercice et pensent que c’est bon pour eux. Alors que très souvent ce n’est pas le cas !

Je me dois également de parler des programmes US ou Canadiens que quelques joueurs et entraineurs récupèrent sur le net ou auprès de leurs contacts outre-Atlantique. Ces programmes sont très bien, là n’est pas la question. Ils sont très bien car adaptés aux capacités physiques, aux possibilités de s’entrainer et au calendrier sportif des joueurs … nord américains.

Je connais des joueurs juniors, ou même seniors, qui reprennent des plans d’entrainement d’université 1er Division alors qu’ils sont loin d’avoir le même emploi du temps (donc les mêmes disponibilités), le même calendrier sportif et les mêmes capacités physiques pour supporter ce programme. On oublie notamment très vite que les joueurs universitaires américains s’entrainent déjà quotidiennement voir bi-quotidiennement au lycée. Ils ont donc déjà 3 ans d’entrainement derrière eux.

Si les intentions des joueurs et entraineurs ayant recours à cette solution sont louables, ils ne se rendent pas compte que la différence de charge d’entrainement entre une pratique composée de 2 à 3 entrainement par semaine en France et celle des universitaires est énorme. Cette solution est même risquée à terme.

Le football américain et le rugby se ressemblent. T’es t-il déjà arrivé de faire de la prépa pour le rugby? Y a-t-il aussi des similarités dans la préparation de ces 2 sports?

Je n’ai jamais fait de prépa pour le rugby à ce jour. Je pense que les deux sports on beaucoup de similarités : explosivité, vitesse, combat, multiplicité des gabarits et profils athlétiques et enfin les traumas subis par les joueurs. Cependant je pense qu’il y a des différences majeures sur les qualités énergétiques à développer et sur le travail de vitesse. Je pense notamment que le football américain demande un enseignement plus approfondi sur les changements de direction que le rugby.

Tu parles sur ton blog des auto-massages. Peux-tu nous expliquer ce que c’est, leur intérêt et à quelle fréquence recommandes-tu ce travail?

Les auto-massages sont rentrés dans ma pratique il y a 3 ans. Au début j’étais méfiant sur le sujet. Puis après plusieurs lectures et un test sur moi-même, j’ai été convaincu ! Il suffit d’un test de moins de 5 minutes pour ressentir les effets et l’intérêt des auto-massages. Le principe est de se masser (pas aussi bien qu’un kiné, j’en conviens, mais qui dispose d’un kiné à disposition en permanence ?) pour permettre un relâchement des muscles et améliorer la qualité des tissus conjonctifs (tendons entre autres).

Leurs applications touchent aussi bien la réduction des risques de blessures que l’optimisation des performances et de la récupération. Actuellement je recommande leur utilisation avant et après chaque entrainement. Lorsque c’est possible, j’emmène même le matériel jusque sur le terrain. J’ai d’ailleurs rédigé un Ebook sur le sujet, disponible sur mon blog http://xavierbarbier.com/ , pour permettre à chacun de pouvoir débuter avec ces techniques.

Quel genre de coach es-tu? Comment les athlètes avec qui tu travailles te décriraient?

Certains me surnomment Xavier le Barbare ! Alors que je ne pense pas être le préparateur physique le plus tortionnaire du monde !

Je pense que ce qui surprend le plus les sportifs que je prépare, c’est que je suis d’une nature plutôt calme et posée dans la vie de tous les jours. Mais mon comportement change nettement lorsque je suis sur le terrain. Certains joueurs découvrent que j’ai la voix qui porte lorsque j’entraine. Je termine souvent les stages avec la voix qui déraille, c’est pour dire…

Lors de mon interview sur ton blog, tu m’avais demandé quel était mon leitmotiv lorsque je prépare des sportifs. A mon tour de te demander le tien…

« S’entrainer bien, intelligemment ». Il faut s’entrainer mieux que les autres si l’on veut faire la différence sur le terrain. La quantité n’est pas le seul facteur à prendre en compte. Chaque minute passée à s’entrainer doit permettre d’être meilleur. Encore plus lorsque l’on est un sportif amateur ou semi-pro. Le temps est compté dans ce cas : l’activité pro, l’entrainement, la récupération, la nutrition, la vie de famille, etc.

S’entrainer intelligemment n’est pas incompatible avec s’entrainer dur, je préfère en rassurer certains !

As-tu quelque chose à ajouter?

Je trouve çà génial que de plus en plus de préparateurs physiques tiennent des blogs comme le tien. C’est bien de faire de la pédagogie auprès des sportifs et entraineurs afin de les aider à comprendre qu’il y a souvent de meilleures solutions et méthodes pour la préparation que ce qu’ils font actuellement. De plus, pour nous professionnels, c’est toujours bon de voir ce que font les autres. Il y a toujours à apprendre.

Un grand merci à toi Xavier d’avoir pris le temps de répondre à mes questions. N’hésitez pas à allez faire un tour sur le blog de Xavier: http://xavierbarbier.com/blog/

Mangez sain , entraînez-vous dur, récupérez et recommencez.

A plus,

Thomas